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Le blog de Bernard SARLANDIE

SNCF : des élus syndicaux dénoncent une campagne de «cheminot bashing» alimentée par la direction

28 Février 2024, 16:26pm

Publié par Bernardoc

d'après Libération du 28 février 2024

Les affirmations sur les revenus des contrôleurs de trains de la SNCF se sont multipliées avant le mouvement de grève du week-end des 17-18 février. Elles sont notamment venues de la part des dirigeants de la compagnie de chemins de fer. «Sur les deux dernières années, les contrôleurs ont été augmentés de 500 euros de plus par mois, en salaire» , a ainsi affirmé Christophe FANICHET, PDG de SNCF Voyageurs, mercredi 14 février. Sur RTL, Jean-Pierre FARANDOU, le patron de la SNCF a ajouté que « la rémunération mensuelle moyenne» des agents de service commercial des trains (ASCT), comme celle des autres cheminots avait augmenté de 20 % en trois ans. «L'addition des augmentations commence à poser problème» , a-t-il commenté.

En réaction, «des droits d'alertes ont été déposés par quasiment tous les CSE (instances de représentation du personnel) de SNCF Voyages» , a indiqué à CheckNews Fabien VILLEDIEU, délégué syndical Sud-Rail. Ces derniers dénoncent «une campagne de cheminot bashing dans les médias» qui peut entraîner un «risque d'augmentation des agressions, outrages et relations conflictuelles entre voyageurs et les équipages des trains, post-conflit social, suite aux propos tenus par les dirigeants SNCF dans les médias», d'après une version consultée par CheckNews. D'après le cheminot, élu CGT, derrière le compte twitter «ControleurPM733», c'est une altercation entre un ASCT et un voyageur mentionnant le salaire des agents, en début de semaine sur un trajet Tours-Paris, qui les a poussés à tirer la sonnette d'alarme.

Sur le fonds, les responsables syndicaux n'ont cessé de remettre en cause les chiffres sur les salaires de contrôleurs communiqués par la direction. «Même si personne ne nie qu'il y a eu une augmentation, les agents ont regardé leur fiche de paie et l'augmentation de 500 euros de salaire par mois est fausse. Pas un seul n'a vu une augmentation de ce montant», indique Fabien VILLEDIEU. Et de rappeler que les salaires des cheminots ont été gelés pendant huit ans, entre 2014 et 2022. Ce qui revenait, de fait, à une baisse de leur pouvoir d'achat en raison de l'inflation.

L'année 2022 s'était achevée sur une grève des contrôleurs pendant les fêtes de Noël qui avait notamment abouti à l'augmentation de 120 euros annuels bruts d'une prime spécifique à leur ligne de métier.

Interrogée, la compagnie ferroviaire précise que les 500 euros bruts supplémentaires par mois évoqués par la direction de l'entreprise «correspondent à l'augmentation moyenne brute ces deux dernières années pour les chefs de bord (les contrôleurs), en intégrant les mesures liées aux négociations annuelles obligatoires pour tous les cheminots, aux mesures individuelles, et aux mesures spécifiques pour les chefs de bord».

Vraisemblablement, c'est aussi en prenant en compte l'ensemble de ces éléments que Jean-Pierre FARANDOU a communiqué sur une augmentation moyenne de 20 %. Fin 2023, le patron de la SNCF était plus précis (et un peu moins généreux). «Sur trois ans, entre 2022 et 2024, les cheminotes et cheminots auront bénéficié d'une augmentation inédite de leur rémunération de 17 % en moyenne et jusqu'à 21 % pour les premiers niveaux de salaires alors que dans le même temps, l'inflation cumulée s'est élevée à 13 %» , avait-il déclaré, fin 2023. Dans ses communications, la direction de la SNCF aurait ainsi mélangé des mesures concernant des éléments de rémunération variables et fixes mais aussi des évolutions individuelles et collectives.

La SNCF n'a en revanche pas donné le montant des rémunérations perçues actuellement par les contrôleurs. «Il n'y a aucune transparence de la part de la direction en termes de rémunération», déplore Fabien VILLEDIEU. Les dernières statistiques publiques remontent à 2016. A l'époque (et jusqu'en 2022), le salaire fixe d'entrée dans la profession était d'environ 2 300 euros bruts par mois (soit moins de 1 800 euros nets). En milieu de carrière, la moyenne était d'environ 3 000 euros bruts mensuels en intégrant les 25 % de variable. En fin de carrière, la part du variable diminuait pour atteindre 19 %. Un ASCT gagnait alors 3 552 euros bruts par mois.

Si l'on se fie aux taux d'augmentation indiqués par le patron de la SNCF, la rémunération (fixe et variable) mensuelle brute d'un chef de bord en début de carrière serait de 2 797 euros, soit 497 euros bruts supplémentaires entre 2022 et 2024. En milieu de carrière (avec une augmentation de 17 %), 3 512 euros bruts (512 euros bruts par mois). En fin de carrière, toujours en estimant que sa rémunération a augmenté de 17 %, un contrôleur toucherait en moyenne 4 155 euros bruts par mois, soit 603 euros bruts en plus.

«C'est bidon» , commente Fabien VILLEDIEU. Médéric LENOIR, syndicaliste Unsa-Ferroviaire donne pour preuve son propre exemple : ASCT depuis 24 ans, son traitement de base a augmenté de 175 euros bruts entre le 1er janvier 2022 et le 1er janvier 2024 pour atteindre 2 095 euros par mois, comme a pu le constater CheckNews sur des extraits de fiche de paie. Même en ajoutant la part variable, le cheminot est loin des 4 155 euros bruts. «Ce sont des moyennes, on peut leur faire toute dire», estime «ControleurPM733».

Les éléments variables de la rémunération peuvent en effet fluctuer, entre collègues, en fonction des lignes, du bassin d'emploi et même selon les mois, en fonction de l'activité de l'agent. Surtout les éléments variables de la rémunération ne sont pas pris en compte pour la retraite. Par ailleurs, «la fin de carrière correspond au bout de la grille (de rémunération) et il n'y a que 1 à 2 % des agents qui arrivent au bout de cette grille avant de partir à la retraite», ajoute l'élu CGT. Après 25 années de boîte, le contrôleur explique avoir perçu une augmentation de «230 euros bruts, primes comprises» tout en précisant que le mouvement de grève portait principalement «sur les difficultés à travailler même s'il y a eu des embauches».

Interrogés sur l'éventualité d'une nouvelle grève, les syndicats ont indiqué attendre les discussions et groupes de travail à venir avec la direction sur divers sujets.

Et ce n'est pas fini...

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