Avant de quitter Goya, j’avais été contacté par un inspecteur qui voulait me proposer quelque chose. Il me rappela peu après la rentrée pour me proposer de prendre en charge la classe-relais de la rive gauche. Un peu naïf, je pensais que j’avais été choisi à cause des qualités qui avaient été remarquées au cours des sept années précédentes. En fait, et je pus m’en rendre compte plus tard, il s’agissait d’un boulet que le collègue qui en avait été à l’initiative sur Mérignac n’avait plus envie de traîner.
En bon militant pédagogique qui pense, à l’instar de Philippe Meirieu, que tout adolescent est éducable, j’arrivai à obtenir un avis favorable du conseil d’administration. Deux enseignantes furent donc rattachées au collège pour s’occuper de ces élèves en difficultés comportementales : une enseignante du primaire et une certifiée de lettres modernes. Comme nous étions à la grande époque des aides-éducateurs, je dus embaucher également deux jeunes pour encadrer les élèves qui allaient nous être envoyés par les collèges alentour. La classe-relais disposait donc de quatre emplois à temps plein pour prendre en charge…8 (HUIT !)élèves !
Ayant pour habitude d’accorder ma confiance aux personnes avec qui je travaille, j’assurais à l’équipe de la classe-relais la plus grande autonomie dans la relation éducative qu’elle pouvait avoir avec son public. Les problèmes commencèrent à surgir lorsqu’elle se mit à confondre autonomie et indépendance, dérive qui peut parfois se produire avec d’autres catégories de personnel notamment dans les pôles santé-social ou vie scolaire. Et lorsque je prétendais reprendre en mains les rênes de cette classe-relais, l’équipe se tournait vers l’inspection académique qui invariablement donnait raison aux enseignants contre leur supérieur hiérarchique.
Pourtant, en tant que gestionnaire de base des deniers de la République, je pouvais en avoir des choses à dire : quatre adultes pour gérer huit ados dont la moitié était en stage et un quart était malade ou avait séché, il me semble que les compétences auraient pu être réparties différemment. J’avais proposé, dans un courrier à l’inspectrice d’académie, une solution qui permettait la prise en charge, dans leur collège d’origine, de quatre fois plus d’élèves ; bien entendu c’est resté lettre morte. Et pourtant, le retour dans le collège d’origine, lorsqu’il se faisait (car un certain nombre d’élèves étaient traduits en conseil de discipline pendant leur séjour en classe-relais et exclus définitivement) était loin d’être évident, j’ai pu le constater pour les deux élèves de Langevin qui y avaient été envoyés.
Au bout de quatre ans, le collège Paul Langevin était déclassé : je perdais environ 175 € par mois. Je décidai donc d’alléger mon travail en conséquence. Le conseil d’administration se prononça donc pour le refus de la classe-relais, d’autant plus facilement que les relations entre les enseignants du collège et celles de la classe-relais étaient exécrables. Soufflon dans mes oreilles venant de la hiérarchie, mais je tins bon et le bébé fut refilé, tout à fait provisoirement à un autre collège de Mérignac, et cette fois sans l’appui de la municipalité qui avait sans doute eu l’impression d’avoir servi de simple financeur pour une action où elle n’avait pas son mot à dire.
Et ce n’est pas fini…