Eau et terre : luttes paysannes contre l'accaparement capitaliste
|Juillet 2024
Du 14 au 21 juillet, dans la vallée de l’Argentière aux abords du marais poitevin, près de 30 000 personnes ont habité et fait vivre le Village de l’eau, au rythme des formations, tables rondes, ateliers et assemblées, soirées-concert et projections. Partie prenante de l’organisation de ce programme, l’équipe de la Fondation Danielle Mitterrand a contribué à construire le fil des échanges que nous avons tissés pendant cette semaine. Des méga-bassines aux sources agro-industrielles de l’accaparement de l’eau ; de la construction politique de la sécheresse dans le marais poitevin à celles d’Espagne ou du Chili ; de l'utilisation de l'eau comme arme de guerre au Rojava et en Palestine aux alternatives paysannes et hydrauliques en Inde ; de la souveraineté alimentaire au Brésil comme en France : nous avons mis au jour, ensemble, comment la domination capitaliste et coloniale opère aussi par la maîtrise de la manière dont l’eau, clé de voûte du pouvoir, circule sur un territoire.
Et la question de la terre et de son usage est bien souvent au cœur de ces enjeux : la demande de moratoire sur les méga-bassines, la suspension immédiate des chantiers en cours, et l’abandon des projets d’accaparement de l’eau ne sont qu’une étape de notre lutte. Pour remonter à la source des dynamiques de son accaparement, il faut pointer du doigt le complexe agro-industriel, les multinationales et les sociétés capitalistes qui accaparent l’eau, la terre et la valeur du travail paysan. Pour déjouer l’artificielle opposition entre « agriculteurs » et « écologistes », et tenter de retrouver la voie d’un dialogue, il faut montrer que les irrigants sont bien peu de choses à côté des grosses sociétés qui les exploitent et les enserrent dans une dépendance économique et technique. Tandis que les revenus des agriculteurs se réduisent à peau de chagrin, partout dans le monde, et que la hausse fulgurante du prix des aliments de base enfonce de nombreuses personnes dans l’insécurité alimentaire, les profits spéculatifs de ces multinationales explosent. La chaîne de spéculations qui converge au port de La Rochelle, où de nombreuses personnes ont massivement convergé samedi, est l'une des expressions de ce modèle extractiviste et colonial qui renforce l'enrichissement d'une élite financière : on y importe la richesse des nations du Sud et on y exporte leur dépendance, mettant en péril la souveraineté alimentaire ici et là-bas.
Comment construire un internationalisme paysan pour retrouver la voie de notre autonomie alimentaire ? Comment les mouvements sociaux et environnementaux se saisissent-ils de cette problématique de la terre, en différents endroits d'Europe ? Quelles alternatives paysannes et communautaires pour une autre gestion de l'eau ? De la (re)découverte des johads en Inde à la création d'un laboratoire de sciences au service des luttes écologistes en passant par les propositions concrètes de mesures pour contrer les accords de libre-échange et promouvoir la souveraineté alimentaire des peuples, des initiatives inspirantes existent d'ores et déjà !
A travers les “Nouvelles des utopies en résistance”, la Fondation Danielle Mitterrand propose de mettre en lumière la diversité et la puissance des alternatives radicales. Pour contribuer à tisser un maillage entre ces utopies “concrètes” et toutes les luttes qui, partout sur la planète, se soulèvent pour qu'adviennent justice sociale, démocratie réelle et soin pour les vivants.
Et ce n’est pas fini...