Début d'un article de L'Humanité du mardi 11 octobre 2022
Après l’annonce de la mobilisation partielle par Vladimir Poutine, des dizaines de milliers de personnes choisissent de partir. Principale destination : la Géorgie, pays voisin qui a vécu un conflit en 2008 avec Moscou. Là, cet afflux massif ne va pas sans générer des tensions...
À l’approche de la frontière géorgienne, une file de plusieurs milliers de voitures russes s’étire sur près de 30 kilomètres. Jusqu’à 30 000 véhicules peuvent se retrouver bloqués à Lars, le seul poste-frontière terrestre ouvert entre la Russie et la Géorgie. À leur bord, majoritairement des hommes qui ont quitté précipitamment leur pays. « On veut échapper à la mobilisation partielle (décrétée le 21 septembre) par Vladimir Poutine. Je ne souhaite pas combattre, tuer ou être tué », explique Volodia, la trentaine, parti brusquement car « des amis viennent d’être réquisitionnés » dans le cadre de l’« opération militaire spéciale » en Ukraine.
Le gigantesque bouchon qui serpente le long d’une route en lacet entre les montagnes semble ne jamais s’arrêter. Si l’alerte était déjà élevée depuis l’invasion de l’Ukraine, le 24 février, les douaniers et gardes frontières géorgiens se retrouvent à pied d’œuvre « 24 heures sur 24, confirme l’un d’entre eux. Nous devons surveiller ce flot ininterrompu de “touristes” russes qui entrent par milliers en Géorgie. Car ils n’ont pas besoin de visa ».
Ce point de contrôle « Kazbegi Lars » reste le seul moyen légal pour se rendre en Géorgie depuis la Russie par voie terrestre. L’attente peut atteindre la journée. Il n’existe plus de vols directs entre les deux voisins. Depuis le conflit de 2008, l’entrée par les régions séparatistes – l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud – demeure interdite. Tbilissi considère que ces deux entités sont occupées par la Russie.
Sur place, les Russes qui franchissent la frontière oublient parfois d’effacer la fameuse lettre Z (symbole des partisans de l’« opération spéciale ») sur leur véhicule. Mais mal leur en prend : les gardes frontières se montrent intraitables en les renvoyant séance tenante dans leur pays. « Tous ces réfugiés ne s’opposent pas à la politique du Kremlin en Ukraine mais cherchent, pour une immense majorité, à fuir afin d’éviter d’être mobilisés et envoyés au front », constate un jeune Russe installé dans la capitale géorgienne.
Et ce n'est pas fini...